Atelier d'écriture... à distance !
Prenez le temps de parcourir les essais des écrivains...
Toi, je t'aimais !
→ La forme : C’est l’histoire d’une rencontre entre deux « personnages » qui vont former un couple. C’est par exemple un pied qui rencontre une chaussure, ou bien une fourmi qui s’installe au cœur d’une fleur, ou bien d’un pinceau qui s’adresse à la toile qu’il va peindre… Une fois choisi votre « couple », vous allez donner la parole à un de ses protagonistes qui va s’adresser à l’autre. Le texte, à la première personne, commencera par : « Toi, je t’aimais. » Il sera divisé en quatre paragraphes : - la première rencontre et ce qui m’a séduit chez toi. - la vie commune : j’ai aimé quand… ; chaque fois que… - les difficultés : mais j’ai détesté quand… - la leçon : aujourd’hui je sais que…

Toi, je t'aimais !
-Ah, toi , il m’a fallu du temps pour apprendre à t’ aimer !
C’est au retour d’un voyage à Londres, que j’ai décidé d’investir dans une théière,mais je ne voulais pas y mettre cher !
-Ah ! Eh bien moi, çà a été le coup de foudre immédiat ! J’étais habituée aux sachets insipides Lipton and co ! Un jour, on m’a laissé dans une farfouille où je prenais la poussière et l’ennui ! Et un matin , j’ai senti la subtilité et la noblesse de tes senteurs !Ah ! quelle alllégresse de pouvoir humer cette douce odeur d’Earl Grey ! Depuis, c’est un rituel quotidien de joie intense et unique renouvelé !
-Pour moi, cela a été un long appprentissage, pour apprécier la robustesse et la qualité de la fonte avec laquelle tu as été conçue . Je te trouvais ringarde , lourde et peu esthétique ! Il y a de tant de modèles joyeux, ingénieux et colorés ! Toi , tu tranchais par ton austérité et ta noirceur !
Après cette longue période d’apprivoisement , je me suis mis à ne jurer que par toi, mais mon degré d’exigence est devenu énorme et tel un bourreau je t’ai rendu responsable de tout. Pour un oui, pour un non, j’étais en colère après toi, parce que l’eau était bouillante, trop tiède, trop calcaire, avec un goût d’eau de javel....J’étais devenu orgueilleux, râlant après toi , que tu oses gâcher ma finesse et ma singularité en acceptant n’importe quelle eau !
-Ah oui, eh bien j’ai pas oublié ; tu me rendais la vie infernale avec tes exigences et tes sautes d’humeur ! Je finissais par apppréhender cet instant où ton humeur pouvait basculer en une seconde ! Et puis,je me suis aussi aperçue que parfois tu infusais si longtemps que ton odeur devenait âcre et très désagréable !
-C’est vrai, Il m’a fallu une prise de conscience longue et douloureuse pour comprendre que ni toi ni moi n’étaient responsables complètement de tout cela ! Eh oui, le coupable , c’est bien lui ! Le maître de la maison ! Parfois stréssé, préoccupé, il nous oubliait !C’est pourquoi, malgré nos bonnes volontés réciproques, on ne voyait pas quoi faire de plus !
- Oui,mais, grâce à notre complicité , on a fini par trouver quelques subterfuges ! Quand, l’eau chauffe trop , je me mets à chuinterer à tue tête et toi , tu as décidé de ne plus exhaler aucune odeur quand l’eau est trop tiède !
Reste que parfois, l’eau est trop javellisé, mais là , il faudrait que notre maître se résigne à n’utiliser que de l’eau de la source , mais çà c’est une autre paire de manches ! Il est tellement dans sa lune !
Claire
«Moi, le stylo-plume qui t’ai rencontré un fameux matin de 1813, ou ma tête s’est posé délicatement sur ta douce peau que tu es que la douce feuille provenant de notre gracieuse et distinguée Jane, bien évidemment Austen. J’ai été ravi d’être remplie d’encre pour pouvoir tracer de magnifiques lettres pour me mettre en lien plus soudés entre nous pour créer une œuvre. Grâce à ta magnifique constance à garder les traces visibles qui nous reliera à jamais et dont, de nombreux lecteurs de fasciner tout en émerveiller en voyant leurs yeux s’illuminer. J’ai été séduit par ta douceur en te touchant gracieusement par ta texture unique provenant des arbres dignes de toi. Je t’ai tellement aimé toi la première feuille de papier qui est arrivé ce fameux jour. Dans la vie tous les jours, c’est vrai, que nous nous rencontrons beaucoup dans le traçage des lettres pour écrire énormément de romans, de lettres ou d’essais romantiques pour nous assembler encore et encore. Chaque fois, que je me pose délicatement sur toi, je rêve à tout ce que nous pourrions faire à l’avenir, et à tous les secrets que nous poserons ensemble sans que nenni ne puisse le découvrir.Avec la stabilité de ton toucher, je vais pouvoir exercer une certaine vitesse d’écriture pour parfaire mes traits couchée et bien aligné. Ainsi, on va produire une épaisseur d’un trait en variant sur les belles lettres rondes ou autres pour envisager de créer des ressentis ou des morales créées de toutes pièces par notre cher écrivain.Toutefois, j’ai détesté à cause des bavures que j’avais salis sur ton doux toucher rêche et blanche comme la pureté vaut tous les diamants de la terre. A part, quand j’ai vu, que notre auteur a froissé l’une de tes congénères. Heureusement,que mon amour pour toi, la feuille blanche, moi le porte-plume, pourrait te brûler tout en entière avec l’amour brulant que j’ai pour toi. Te voir partir en fumée serait pour moi l’un des pires cauchemars sur terre. Ce que je retiens aujourd’hui, je sais que je ne pourrais jamais cesser d’aimer pour tracer de belles lettres d’amour pour te prouver que toi + moi est égale à l’infini.»
Mama
Toi, je t'aimais !
" Toi, je t’aimais.
Je t’ai rencontrée dans une boutique. Tu étais discrètement installée sur une étagère pointure 42. Ces
étagères-là sont, bien souvent, coincées au fond, dans un petit coin. Après être passé devant les 36, 37, 38, 39 et 40, étagères larges, bien garnies, j’arrive devant celles des 41 et 42. Sur les rayons, pas de modèles à talons, peu de couleurs mais des chaussures sobres, plates. Je me chausse dans du 42, je n’ai pas envie de prendre de la hauteur ni d’attirer les regards, je souhaite rester discret. Et là, je t’ai vue : bottine en cuir noir lisse, talon de trois centimètres, fermeture éclair dorée avec une petite feuille fantaisie en guise de tirette, surpiqûres en relief sur la tige et même quelques strasses à la base de la semelle. Je t’ai trouvée très belle. Certains pieds diraient : « Trop classique ! ». Je t’ai essayée et moi, pied grec, sensible, long mais fin, je me suis trouvé bien immédiatement. Aucun frottement sur le talon, aucune gêne au bout des orteils. Douceur sous la plante. J’ai marché sur le tapis rouge installé dans l’allée de la boutique.
Vraiment, toi et moi étions faits l’un pour l’autre. J’ai décidé que l’on pouvait essayer de vivre ensemble.
J’ai aimé quand on m’a dit que tu étais stylée, qu’on était bien assorti. Tu m’as accompagné partout, par tous les temps. Chaque fois, je t’ai choisie pour toutes les occasions de la vie : chaque jour pour aller travailler, le soir pour aller au restaurant ou au spectacle et même le dimanche pour arpenter les chemins.
Il n’existait plus que toi pour moi.
Mais j’ai détesté quand j’ai senti davantage les cailloux en marchant. Il a fallu t’emporter chez un
cordonnier pour un ressemelage. Mais, à ton retour, j’ai retrouvé le même plaisir avec toi. Puis, la
fermeture éclair a déraillé, quelques strasses se sont décollés, la surpiqure s’est effilochée. Pire encore, le cuir s’est râpé, élimé. Il a fallu que je me rende à l’évidence : tu me lâchais. Je ne pouvais plus compter sur toi. Finie notre connivence, notre complicité. Terminé mon bien-être. Il a fallu prendre une décision..
Je suis retourné dans la même boutique. J’y ai rencontré une de tes cousines : plus de strasses mais des petits clous. J’ai reconnu le confort, atavisme familial.
Aujourd’hui, tu es posée sur une étagère, coincée au fond, dans un petit coin de la cabane de jardin. Je te retrouve occasionnellement pour les travaux salissants.
Je sais que tu m’as montré le chemin du confort, que tu as le sens de la famille et que je pouvais avoir confiance en toi. "
Sylvie Seignez
Toi, je t'aimais !
Ce fut un grand moment d’intimité avec toi Juliette, que de transposer délicatement tes traits
gracieux. Je me suis enhardi, j’étais joyeux, j’avais toujours une bonne mine. Et avec la poussière
de mon plomb, j’ai coloré tes longs cils. Avec ma substance, j’ai ombré tes yeux ne laissant
qu’une pointe de lumière y apparaitre, comme pour donner une âme à ton regard.
Mais j’ai détesté quand ce fût le moment de te coiffer, d’apporter des nuances à cette belle
chevelure brune. J’ai détesté, car je patinais, je dérapais un peu par instant. Je n’arrivais pas reproduire de ma mine grasse, le soyeux et le luisant de tes cheveux. Je les rendais filasseux et ternes.
J’ai dû faire appel à ma fidèle collègue de trousse, ma compagne ; la gomme blanche.
Mais je manquais de précisions dans mes traits, dans les ombres.
J’ai même fait quelques pâtés lorsque ma mine s’est cassée.
Aujourd’hui je sais que le crayon de papier que je suis, ne s’est pas ménagé, s’est bien usé, s’est un peu éreinté. Je me suis souvent émoussé et j’ai dû plusieurs fois me faire affuter dans ce taille crayon qui m’arrachait à chaque fois de mes copeaux de bois.
J’ai dû souffrir, je t’ai donné de ma matière. Je t’ai donné de ma personne sans compter, pour que ton visage soit merveilleusement beau et fidèle à ta photo.
Mais jamais rien n’est gagné d’avance et qu’il faut rester confiant en soi et rester sain dans son corps, dans ma matière.
Il est vrai que je me suis donné cette peine pour être formé et fabriqué dans une des meilleures écoles et usines à dessin, celle de « Faber-Castell ».
Maintenant que ma mission est terminée, je m’interroge, lequel des deux, de la photo ou du dessin, j’aime le mieux.
Alain Damotte

Toi, je t'aimais !
Le stylo et le cahier
Le stylo à bille et le cahier s'étaient rencontrés par hasard lors d'une fête organisée quelques jours après la rentrée universitaire. Posé sur un tabouret dans le studio de Jeanne, le stylo s'était laissé glisser dans un sac d'étudiant, pour changer d'horizon, pour rencontrer une autre Jeanne ou un Samuel peut-être...
C'est au creux d'un cahier de Paul qu'il se trouva coincé et aussitôt adopté. Ils avaient ri, ils formaient un couple raisonnable, discret; Le stylo, impatient se jeta sur la première feuille du cahier où il se mit à courir afin de raconter des histoires qu'il avait entendues enfant et qu'il avait peur d'oublier. De temps en temps, il hésitait, et au lieu de suivre scrupuleusement les lignes des petits carreaux, il glissait à toute vitesse sur le blanc du papier, parfois en tous sens, parfois réalisant de larges courbes, des lignes brèves entrecoupées de points, parfois encore il ne faisait qu'un seul point, prêt à se faufiler sous la belle courbe de l'interrogation.
Sous l'assaut du stylo, la feuille se sentait vivante, indispensable, aimée.
Parfois, le stylo indécis, embarassé, s'arrêtait ; il relisait l'enchevêtrement des mots et des signes tracés, un charabia, et subitement il rayait nerveusement des lettres, des graphismes, plusieurs lignes.
Devenu illisible, le message était abandonné.
La feuille était souvent blessée par le geste vif et appuyé du stylo.
Elle était alors arrachée et finissait dans la corbeille avec ses soeurs des jours précédents.
Tant de feuilles perdues
Tant de feuilles oubliées
Tant de feuilles méprisées
Le stylo riait de son audace
Cependant, les histoires racontées, les souvenirs évoqués seraient perdus à jamais. Personne ne pourrait ni les retrouver, ni les déchiffrer.
Un mois durant, le stylo ivre de mots et de signes avait improvisé et composé en solitaire une oeuvre singulière, sourd à l'attente du cahier qui se sentit inutile.
Le coup de foudre avait duré ce que durent les roses, l'espace de quelques instants
Le cahier aux cent pages, amaigri, usé et incompris rendit son dernier soupir.
Bon vent au stylo "agité du bocal"
Non rechargeable, il vivra ce que dure un bouquet de roses.
Mium

Toi, je t'aimais !
Brève idylle
La petite cuillère était serrée, en position foetale, contre ses soeurs.
Quand elle vit le jour, elle fut aveuglée,
Elle respira profondemment et ce fut un ravissement.
Disposée comme ses jumelles derrière l'assiette, elle-même posée sur une nappe fleurie, elle rayonnait.
Ce n'était pas encore le printemps, mais un jour de fête !
Au dessert, elle plongea dans une crème onctueuse et fraiche.
Un délice
Puis effleurée par des lèvres pulpeuses, elle aprécia la caresse
Enfin, elle fut rapidement happée par une bouche gourmande, léchée, sucée
Quel plaisir !
Mais à présent re-léchée, re-sucée, mordillée
Ce jeu-là, elle n'a pas aimé
C'était violent, douloureux
On ne lui avait pas demandé son avis.
Elle perdait son souffle, sa dignité
Quand elle fut jetée avec les restes du repas parmi les ordures grasses, collantes, puantes, elle s'évanouit.
A son réveil, elle voulut demander le divorce, s'enquit des démarches nécessaires
Elle n'en eut pas le temps
Prisonnière dans un sac en plastique, elle étouffa et fut broyée le lendemain matin à l'aube entre les machoires puissantes de C,Poub.
Mium

Toi, je t'aimais !
Le pull-over
Au marché, il était déposé là, sur un étal bas, sur un vieux lit de camp, avec de nombreux effets, la plupart usés, rapés, sans forme ; quelques uns au contraire étaient tout neufs, à peine froissés, avec une étiquette parfois ,
Etiquette, témoin d'une vie antérieure dans un vrai magasin où le pull avait sans doute cotoyé des frères. Des regards s'étaient posés sur eux, souvent rapides mais parfois soutenus, regards accompagnés de l'effleurement d'une main ou d'une prise en mains précise et forte cherchant à évaluer la qualité, la tenue et la résistance de leur constitution. Mais lui, contrairement à ses frères n'avait jamais été retenu. Il n'avait pas plu et avait atterri, en fin d'hiver, au fond d'un carton profond qui s'était rempli au fil de la saison suivante.
Un matin le pull sentit ses derniers jours arriver, il étouffait, un grand bruit le réveilla brusquement. Il fut balloté sans ménagement ; son carton fut déplacé, lancé, roulé, choqué brutalement, et pour finir il fut transporté dans un véhicule qui vibrait sur les pavés dans un bruit étourdissant. Après quelques heures, le véhicule s'immobilisa ; un grand silence se répandit et le froid s'insinua, de plus en plus mordant.
Au petit matin, il se retrouva sur cet étal dans un agglomérat de vêtements. Le jour se levait, il put reprendre ses esprits, enfin.
Il entendit des voix ; des mains cherchaient dans les étoffes : qui un tissu léger, qui un lourd velours, qui un coton fleuri, car, oui, dans ce tas, les couleurs chatoyantes et les fibres se lançaient des éclats de vie.
En ce début d'été, le pull-over ne fut pas convoité ; il n'était plus de saison.
Vers midi, les clients ne se pressaient plus. La vente était sur le point de se terminer quand, Il se sentit saisi par une main volontaire, une main qui le tirait sans réussir toutefois à l'extirper de la masse. Venu à la rescousse, le vendeur prit le tas à pleines mains, le secoua, le brassa énergiquement ; le pull libéré, tel un élastique, fit un vol plané et atterrit sur une tête bouclée, surprise, et qui sentait fort bon, un parfum de fleurs.
Eclats de rire
Eclats de joie
Jeté sur les épaules, le pull avait trouvé un chaland heureux
Il eut le plaisir de sentir le contact de la peau, les courbes du corps, les mouvements amples d'une jeune fille rieuse entourée de copines tout aussi enjouées. Ce jour là, elles avaient toutes acheté un vêtement. Elles se réunirent après afin de tester les trouvailles de chacune. Ce fut jour de fête. Jour de chants, d'éclats de voix, de danses ponctués de fous rires.
Le pull se retrouva sur les épaules de Jeanne qui rentra chez elle.
Enfin seuls !
Mium